Quelque part, une route secondaire...

113.

Auparavant , villa de Salsa..

Ambiance..

La route défilait sous ses yeux à grande vitesse, comme un serpent qui sinuait, ruban gris de goudron qui se déroulait à l‘infini devant elle. C’est à peine si elle voyait les autres véhicules qu’elle dépassait, son esprit s’étant resserré autour d’une seule pensée, mettre fin à ses jours, mette fin à son cauchemar. Ses yeux quittèrent un instant la route pour jeter un coup d’œil sur l’arme qu’elle avait posé sur le siège passager.

L’arme qu’elle avait dérobé aux vigils serait son passeport pour la tranquillité, Salsa n’avait pas besoin de preuve, elle se contenterait de reprendre ce que ce malade lui avait volé, sa sécurité, une partie de sa vie, et si elle ne faisait rien, il lui volerait aussi sa seconde chance, il la supprimerait elle.
Mais Salsa cette fois ne le laisserait pas faire, ne se laisserait pas surprendre, cette fois c’est elle qui avait les cartes en main.

Julian…le chirurgien, la même personne. C’était lui qui l’avait poursuivi, harcelé, mais dans quel but? Pourquoi? Salsa se souvint des derniers évènements, l’échange de coups avec Johnny, comment elle l’avait fait mettre à la porte… *oh mon dieu*… chaque fois qu’il était venu la voir dans la loge, tentant de lui voler un baiser… la photographie…*reste concentrée, tiens le coup* … Mais les images se mêlaient aux souvenirs, son esprit avait commencé un retour en arrière que Salsa ne savait plus interrompre.

Cet éclair d’argent dans la nuit noire, cette silhouette masquée, la brûlure de la lame, douleur fulgurante et le néant, toutes ces nuits dans cet horrible hôpital, toutes ces questions, ces inspecteurs… « nous le retrouverons, soyez en certaine »…Elle serrait le volant tellement fort que ses jointures blanchissaient..
Le doute, la peur, les angoisses, et tous les cauchemars….. Julian dans toute sa superbe qui se penchait au dessus d’elle, c’était il y a si longtemps, Julian qui lui faisait l’amour… la photographie…

Un bruit de freins qui sifflent, Salsa s’était arrêtée en urgence sur le bas côté, ouvrant la portière à la volée, pour se pencher et vomir ses tripes, son dégoût, alors que les larmes de honte lui brûlaient le visage. Elle le savait, face à lui, Salsa n’hésiterait pas, l’abattre serait le seul moyen d’effacer tout le reste, il n’y avait que sa mort qui la délivrerait. Salsa ne pourrait plus vivre avec ces souvenirs, ces images. Il avait bien réussit son coup, distillant son venin jour après jours, mois après mois, dans son esprit dans son cœur. Il n’y avait qu’un seul moyen d’effacer tout ça, de pouvoir recommencer à vivre pleinement.. Libre..

Salsa se redressa et prit un mouchoir dans le vide poche pour s’essuyer le visage, il était glacé, comme le revolver qu’elle reprit en main pour se rassurer.

114

Ambiance..

Il était là face à elle, Julian.. L’heure de la vengeance avait sonné, elle allait enfin se débarrasser de lui, l’arme lui parut encore plus glacée dans ses mains. Elle ne reculerait plus, une simple pression sur la détente et elle revivrait…

Ce n’était plus Julian en face d’elle mais Johnny, l’image se brisa, puis le noir. Salsa ouvrit les yeux en sursautant, son esprit encore confus de ce mauvais rêve. Mais que faisait-elle là? Jo penché au dessus d’elle avait l’air terriblement inquiet. Salsa tourna un peu la tête et aperçut les deux inspecteurs, Tom et..

- Johnny !!!

Elle avait poussé un cri terrible en se dégageant de l’étreinte de Jo et s’était précipitée vers son homme que Tom tenait par les épaules. Accroupie au sol. Salsa était horrifiée, son bandage était taché de sang, le cauchemar…Elle ne comprenait plus, et c’est d’une voix désespérée qu’elle leur demanda.

- Mais … mais que c’est- il passé? Pourquoi est-il inconscient?
- Johnny!!! Johnny mon amour, qu’est-ce que j’ai fait…mon dieu…

Ses yeux se noyèrent de larmes, alors qu’elle s’agenouillait auprès de son homme. Tom posa une main sur son épaule, lui d’ordinaire si distant se laissa attendrir par cette femme dont le chagrin et la culpabilité se lisait sur son visage.

- Il ne s’est rien passé du tout, son ancienne blessure a du se rouvrir.. Il aura sûrement besoin de refaire un point de suture ou deux.. Mademoiselle Inferno? C’est rien, allons! Il n’a rien de grave..

Salsa dont les larmes coulaient à présent librement sur son visage, n’arrivait plus à détacher ses yeux de son homme inconscient et la blessure qui saignait à nouveau. Elle nageait en plein cauchemar, qu’avait-elle fait? La voix de Tom lui parvint de loin.. La blessure, elle s’était rouverte. Salsa regarda alors son garde du corps qui lui fit un sourire rassurant, puis se tourna vers les deux inspecteurs, complètement assommée par la tournure des évènements.

- Bon pas besoin d’ambulance, tenez il revient à lui. Messieurs, je pense qu’une visite à l’hôpital s’impose, mademoiselle est visiblement choquée quand à monsieur Cash, il a besoin lui aussi de quelques soins. On va vous escorter jusque là-bas, et nous aviserons ensuite.

Salsa se pencha aussitôt vers Johnny qui rouvrait ses yeux doucement, grimaçant de douleur. Elle lui prit la main et lui caressa la joue alors que Jo et Tom organisaient la suite. Jo aida Tom à soutenir Johnny jusqu’à la seconde berline où ils l’installèrent confortablement à l’arrière. Salsa s’était redressée et assistait à la scène comme si elle n’en faisait pas partie. Tom revint la chercher pour l’entraîner doucement vers l’autre côté de la voiture, la faisant s’assoire juste à côté de Johnny. Jo de son côté repartit vers la berline que Salsa avait laissé sur le bas côté. Les flics étaient déjà dans leur véhicule près à partir. Tom après un coup d’œil dans le rétroviseur, démarra le contact de la voiture et l’étrange cortège se mit en route.

Johnny qui s’était callé contre le dossier, tête appuyée en arrière, pestait contre la douleur qui lui vrillait l’épaule, puis il regarda Salsa et lui dit entre deux plaintes.

- Salsa! Tu nous as fait si peur.. J’ai cru.. Argh.. Pourquoi t’être enfuie comme ça?

Il laissa de nouveau sa tête retomber contre le dossier. De son côté, Salsa se rappelait image après image, comme une bobine que l’on ré enroule, ce qu’elle venait de faire, après avoir quitté la villa, et puis, ce moment de déconnexion total… Elle avait faillit tirer…Une nouvelle nausée lui souleva le cœur, Salsa sans prononcer un mot, posa le dos de sa main contre sa bouche et détourna le regard en murmurant dans un souffle à peine audible, comme une litanie..

- je suis désolée…je suis désolée.. Je ne voulais pas…je suis désolée……..

Les larmes à nouveau coulèrent sur son visage, elle n’osait plus le regarder.. Lui l’homme qu’elle aimait tant et qu’elle avait failli …. Elle ferma les yeux, et se replia sur elle-même…

21.

Auparavant, propriété Tanner..

Eli était troublée. Tout à l’heure, pendant un instant, face à Colin, elle avait senti quelque chose qui avait changé, mais elle était trop confuse à cause de l’alcool pour bien comprendre ce qu’il s’était passé. Puis José était intervenu et immédiatement il s’était interposé entre elle et son garde du corps. Mais qu’est-ce qu’il avait à toujours à débarquer au mauvais moment lui? Et puis Eli trouvait qu’il se mêlait un peu trop de sa vie. Tout le monde voulait un peu trop diriger sa vie, alors qu’elle voulait être seule maîtresse à bord. Son regard dériva vers le miroir et tomba sur le collier dont l‘extrémité se glissait dans son décolleté. Elle caressa encore les jolies perles à l‘éclat nacré et d‘une voix distraite demanda à José.

- Tu aimes mon nouveau collier ?
- Oui, il te va à merveille comme tout l'reste, c'est un cadeau d'ton père ?

Eli jeta un regard en coin à José et s’écarta de lui, il venait de répondre à la question qu’elle avait posé à Colin.

- Non.. Mais si tu veux, je te montre ce que m’a offert mon père.
- Ah oui! Bonne idée, c’est quoi?
- Suis moi, tu verras..

Elle l’entraîna en le prenant par la main jusqu’à rez de chaussée et attrapa dans l’entrée, les clefs qu’elle avait laissé tout à l’heure sur la commode. Elle rit en les agitant sous le nez de José qui n’avait pas encore compris jusqu’à ce qu’elle lui désigna la rutilante voiture qui avait soigneusement été parquée dans le garage par l’un des gardes sans aucun doute.

- C’est elle, mon cadeau!
- Tu rigoles?

Eli rit devant la mine stupéfaite de José et lui répondit.

- Mais non, c’est bien ma nouvelle voiture.
- Ben merde alors, il s’est pas foutu de toi ton vieux..
- Nan en effet..
- Et toutes ces caisses, c’est dingue.. Hey, Eli, je viens d’avoir une idée!
- hmm? Quoi?
- Si on allait faire un tour dans ta nouvelle caisse?
- Quoi, là tout de suite? Mais…
- Ben ouii, trop génial! Allez viens!!

Eli un peu perdue et les idées pas très en place, haussa les épaules.

Ambiance!

- ok, mais c’est moi qui conduis!
- Yahouuuuuu, ouaaiis, c’est partii!!

Eli se demanda encore si c’était une bonne idée, un détail lui échappait dans tout ça, mais elle n’arrivait pas à mettre le doigt dessus. José avait déjà bondit dans la voiture sans même ouvrir la portière. Il était surexcité à présent et sa joie fut vite contagieuse, balayant les dernières objections d’Elisha qui grimpa à son tour dans la Ferrari. Bientôt le moteur vrombit et la porte du garage s’ouvrit pour les laisser passer.

La voiture passait le portail quand Colin en jurant saisit le trousseau des clefs de la Ford Torino. Il avait attendu un moment qu’Eli redescende de la chambre, mais comme elle ne venait toujours pas, il s’était décidé à voir de quoi il retournait. Ce José ne lui inspirait pas du tout confiance, mais au moment où il découvrait qu’ils n’étaient plus dans la villa, un des gardiens venait lui signalait que les deux lascars s’en allaient dans la fameuse Ferrari.

La seule pensée qu’il eut à ce moment, c’est qu’Eli n’était pas du tout en état de conduire, mais que pouvait-il faire si ce n’était de la suivre et essayer de parer au pire? Il eut tout juste le temps de les voir tourner à l’angle de la rue quand à son tour il passa le portail à bord de la Ford. Le regard plissé, concentré pour ne pas les perdre de vue, il continuait de jurer à haute voix à présent.

Eli tout au plaisir de diriger ce petit bolide, riait et se laissait griser par le vent qui faisait voler ses cheveux, encouragée par José qui lui demandait à chaque fois d’accélérer toujours un peu plus. Ils roulaient à présent dans l’avenue principale de Lorena Hills, bien plus vite que le leur permettait la limitation de vitesse.

Colin leur filait le train assez proche pour que José le premier réalisa qu’ils étaient suivis. Il se retourna et en riant avertit Eli.

- Eh on dirait bien que l’autre gorille nous a pris en chasse!!
- Quoi ??

Eli jeta un coup d’œil dans le rétroviseur, un peu trop longtemps ce qui fit faire un méchant écart à la voiture, mais elle redressa juste à temps. José à ses côtés exultait.

- Haha, trop fort. S’il croit qu’il peut suivre une bagnole comme celle-là.. Vas-y Eli on va le semer!.. Allez fonce!
- Hey je crois qu’on roule déjà assez vite!
- Vas-y !! J’te dis!! Plus vite!

Eli fit un sourire un peu crispé. Cette situation ne lui plaisait pas trop mais c’est à ce moment que la voiture de Colin arriva à leur hauteur. Il avait baissé la vitre et visiblement lui montrait de s’arrêter. Elle tourna brièvement la tête, juste le temps de croiser son regard et de lui adresser un sourire en coin. Puis appuya un peu plus sur l’accélérateur, prenant à nouveau de la distance sur le véhicule de Colin. Et elle éclata de rire en s’imaginant la tête qu’il devait faire. L’idée de José était assez amusante finalement.

(26)

Musique..

Cette fille était dingue et là elle avait vraiment dépassée les bornes, il ne savait pas quelle idée lui était de nouveau passer par la tête mais elle allait se tuer à rouler à une vitesse pareille et comme si ça ne suffisait pas il avait fallut qu'elle emmène ce crétin qui l'avait certainement poussé à prendre le volant alors qu'elle n'était pas en état pour ça, il allait vraiment lui casser la figure cette fois et il ne s'en sortirait pas avec une simple lèvre fendue et un nez cassé !!!

Le moteur de la Ford Torino vrombit et Colin appuya comme un fou sur l'accélérateur, s'engageant à la suite de la Ferrari en zigzaguant tout comme elle, dangereusement entre les autres voitures qui roulaient elles à une vitesse raisonnable, ça klaxonnait dans tous les sens et ils avaient de la chance qu'une voiture de police ne les ait pas encore prit en chasse. Cette fois-ci elle aurait beau lui sortir toutes les excuses qu'elle voudrait il dirait tout à son père et qu'en importe les conséquences si ça pouvait lui mettre du plomb dans la cervelle.

Des rires et des cris fougueux s'échappaient de la Ferrari alors que le conducteur de la Ford Torino s'égosillait derrière son volant en crachant des insultes à tout va, contre la gamine et son compagnon de voyage, contre lui et les autres conducteurs qui se mettaient entre lui et la fugitive.

« Fais demi tour Eli, tournnnnnes ! »

La petite blonde tourna le volant sur la droite et le véhicule faillit faire une embardée, les deux roues du coté gauche se soulevant à deux centimètres au dessus du sol avant de retomber lourdement sur le bitume sous les cris de joie de José, fier de sa manœuvre, elle avait coupé la route à deux autres voitures et avait frôlé de peu l'accident.

Mais elle n'eut pas le temps de réaliser quoi que ce soit, embrumée par les vapeurs de l'alcool que l'hispanique lui hurla dans les oreilles de presser l'accélérateur et la Ferrari repartit dans le sens inverse, redescendant la route principale qu'elle venait de monter, José en profitant pour faire un doigt d'honneur à son garde du corps qui arrivait en contresens.

« Mais elle est malade !!! »

Il pila, le pied enfoncé sur le frein et ce fut une chance qu'une voiture ne lui emboutit pas le cul. Il était en colère et dans ces cas-là il était imprudent malheureusement, le pire dans cette histoire c'est qu'il avait peur pour cette merdeuse insouciante qui le prenait une fois de trop pour un con, il se jura intérieurement que c'était la dernière fois et fit plus calmement que sa protégée demi-tour sur la chaussée et repartit à la suite de la Ferrari qui tourna à gauche au carrefour.

Les deux lascars avaient une bonne longueur d'avance et le petit bolide fonça sur la route déserte, José était en pleine euphorie mais Eli elle sentait qu'elle allait être malade, l'alcool lui tournait la tête et ils avaient roulé beaucoup trop vite tout à l'heure. Elle prit à droite, puis à gauche et encore à droite pour finalement arrêter le véhicule sur la voie ferrée, déserte en temps normal.

« Youhouuuu c'était trop bon ! On l'a bien eu l'autre gros naze ! On fait quoi maintenant ? »
« On rentre... »
« Quoi ? Nan tu rigoles ! Eli faut en profiter là, on est libreeeeee ! »
« J'ai mal au crâne. »
« Allezzzzz Eliiiii ! »

Ding ding ding ding ding...

Les barrières de la voie ferrée s'abaissèrent et le voyant rouge se mit à clignoter, annonçant le passage prochain d'un train. José se releva de son siège pour observer à droite puis à gauche, cherchant à l'horizon la tête de la locomotive, alors qu'Eli se massait les tempes, la sonnerie retentissant au centuple dans sa tête.

« Euuuh, on devrait peut-être bouger non ?! »

Eli rouvrit les yeux et observa devant elle, la barrière était baissée et ça lui posait un petit problème pour passer, il était hors de question qu'elle raye la voiture que lui avait offert son cher papi. Une moue dubitative s'afficha sur les lèvres alors qu'elle tapotait de ses doigts sur le volant avant d'apercevoir l'ouverture manuelle, c'était la solution.

« Vas ouvrir la barrière. »
« Et j'fais ça comment ? »
« Y a une manivelle là. »
« Ha ouais ok j'y vais bouges pas ! »

José ne prit pas la peine d'ouvrir sa portière et sauta par-dessus, ses pieds glissants dans les graviers et se rattrapant de justesse avant d'éclater de rire, visiblement pas plus clair qu'elle à ce moment-là, il descendit des voies et s'approcha de la barrière, suivant les indications d'Eli pour mettre la main sur cette fichue manivelle qu'il ne trouvait pas et lentement mais surement la barrière se releva, laissant le passage au véhicule, seulement mauvaise surprise une fois en haut, le cran de sécurité avait lâché.

« Eli, cette putain d'barrière tient pas seule, j'dois la tenir, démarres et amènes toi ! »
« Okay ! »

Colin tapa de rage sur le volant de sa Ford Torino, cette gamine avait réussi à le semer, c'était la meilleure ça. Arrivé à un croisement il était incapable de savoir quelle direction elle avait prit avec la Ferrari et à moins d'un miracle il ne réussirait jamais à la retrouver. Encore une fois il avait faillit à son poste et Tanner Père ne se gênerait pas pour le virer dès demain matin quand il apprendrait la nouvelle.

* J'vais la tuer... j'vais la tuer ! *

Il crispa ses mains sur le volant en cuir et inspira une longue bouffée d'oxygène, il avait envie de s'allumer une cigarette mais avant il fallait qu'il retrouve cette fille et qu'il lui foute la peur de sa vie. Il finit par baisser sa vitre conducteur et tendit l'oreille, le son caractéristique et répétitif d'une barrière de voie ferrée lui montant aux oreilles, c'était peut-être une piste et il redémarra en trombe tournant à gauche au croisement.

« Eli, qu'est-ce que tu fous ? Grouilles ! »
« Ouiii ça va, deux secondes ! »

Eli ne savait pas pourquoi mais ses mains étaient tremblantes et elle n'arrivait pas à faire démarrer sa Ferrari, elle avait beau tourner les clefs dans le contact, rien n'y faisait, c'était bien sa vaine tiens, ce n'était pas du tout le moment même. Le sifflement du train attira son attention, il serait bientôt là et il fallait à tout prit qu'elle bouge la voiture et vite !

« Eli, démarres ! Le train arrive ! »
« J'ai vu !!! Mais elle veut pas, j'y arrive pas ! »
« Quoi ?! Rigoles pas Eli c'est sérieux là ! »
« Je sais mais elle veut pas j'te dis !!! »
« Ben laisses-la là et descends ! »
« Tu rigoles, mon père va me tuer ! »

La Ford Torino fit alors son apparition au bout de la rue, arrivant dans le dos de la demoiselle et Colin écarquilla les yeux devant le spectacle, se demandant ce que faisait la Ferrari au milieu des voies alors que le train était en approche. Et quelle ne fut pas surprise en se rendant compte que c'était Eli qui était derrière le volant et qui semblait-il s'énervait pour faire démarrer la voiture.

« C'est quoi ce binz ?!!! »

La locomotive se mit une nouvelle fois à siffler, figeant les mouvements de la blondinette derrière le volant, l'alcool ayant grillé ses derniers neurones pour lui permettre de réagir. Elle déglutit avec mal et regarda le train s'approcher dangereusement de la voiture, il ne restait que quelques mètres avant la collision. José avait beau s'écrier en observant le spectacle mais elle ne réagissait pas, elle était seule dans sa bulle et pourtant la portière du conducteur s'ouvrit et une poigne ferme la tira à l'extérieur, lui arrachant un cri de surprise et de frayeur.

Colin était sortit de nul part et il l'entraina d'un pas hâtif vers la route, José laissa retomber la barrière en les voyant arriver, le garde du corps l'attrapa par le col et ils furent tous les trois précipités dans le fossé au milieu des ronces. Le sifflement de la Locomotive ne s'arrêtait plus et le bruit d'un froissement de taule monta à leurs oreilles suivit d'une explosion qui projeta en l'air quelques morceaux de ferraille ainsi qu'un pneu qui roula sur quelques mètres en touchant le bitume avant de s'immobiliser, une vague de chaleur leur brulant le dos.

Ils étaient sains et sauf mais la Ferrari n'était plus qu'un souvenir...

22.

Cet énorme vacarme qui sembla durer une éternité resterait longtemps ancré dans ses souvenirs. Mais il avait aussi du coup chassé les vapeurs d’alcool qui embrumaient l’esprit d’Elisha. Elle avait hurlé quand le train avait manqué de peu de l’écraser en même temps que la voiture. Mais Colin encore une fois était arrivé à temps, et ’il avait sauvé José par la même occasion. Tout s’était enchaîné si rapidement.

Eli fixait la portière déformée de la Ferrari qui se balançait encore sur le bitume juste à quelques mètres d’eux, dans un étrange bruit de ferraille. Elle était complètement tétanisée et incapable de prononcer une seule parole, ce qui n’était pas le cas de Colin qui s’était redressé et lui criait copieusement dessus.

- Nom de dieu, Eli!! Vous vous rendez compte de votre conduite? Prendre le volant dans votre état, c’est incroyable d’irresponsabilité mais là, cette course poursuite dans la ville c‘était trop stupde! Pourquoi vous vous êtes pas arrêtée quand je vous ai fait signe? Mais non!! C‘était plus fort que vous, il a fallu que vous jouiez encore une fois les têtes brûlées... Bon sang!! Vous avez failli y passer!

Eli gardait ses yeux fixé sur la portière qui avait cessé son mouvement de balancier et la seule chose qu’elle trouva à dire, trop choquée par l’évènement fut:

- Ma voiture! Mon dieu.. Papi va m’étriper..

Colin la fixa un instant stupéfait, puis commença à la secouer comme un prunier.

- Nom d’un chien! Elisha, vous réalisez ce que vous dites?? C’est pas de votre voiture dont je vous parle, mais de vous, un peu plus et vous ..

Eli leva ses grands yeux verts un peu absent sur Colin.

- Et bien comme ça, vous auriez été content, vous n’auriez plus eu à me supporter

Elle lui aurait presque souri, mais Colin n’eut pas du tout envie de rire, il était hors de lui et quand elle eut prononcé ces mots, le geste partit tout seul. Il lui donna une gifle retentissante et José qui était resté en retrait jusque là, autant choqué qu’Eli s’interposa.

- Hey! Ça va pas non??

Le regard de Colin le foudroya sur place. Il pointa un doigt accusateur sur le jeune homme et siffla entre ses dents.

- Toi, petit merdeux, je te conseille de te tirer vite fait ou je me charge de t’écraser comme aurait du le faire ce train. On se reverra un autre jour pour régler cette histoire, mais pour l’instant casse-toi et vite!

José ouvrit la bouche dans l’intention de protester, mais soudain il se ravisa et sans un mot pour Eli, fit demi-tour pour rentrer chez lui sans traîner. Il n’avait plus envie de faire la fête à présent. Quand à Eli, elle restait là bouche ouverte, une main tenant sa joue qui portait une belle marque rouge, les larmes aux yeux. Elle jeta un regard d’incompréhension à Colin, remuant la tête dans un geste de négation puis le contourna pour grimper jusque sur la voie et retourner sur la route. Ses yeux lui brûlaient à présent, peut-être du aux larmes, elle ne savait plus très bien, mais elle n’avait plus envie de le voir et désirait juste se réfugier chez elle.

- mais c’est pas vrai!! Ou est-ce qu’elle compte encor aller comme ça!! Eli, attendez! Mais attendez bon sang!!

Il la rattrapa et la fit brusquement se retourner.

- Vous allez bientôt cesser vos petits caprices ?

Eli plongea ses yeux dans les siens, le dévisageant comme si de ce seul fait il pouvait comprendre ce qu’elle ressentait, mais c’était trop espérer d’une brute épaisse comme cet homme. Elle finit par se dégager et d’une voix éteinte lui répondit.

- Lâchez moi!!..Je veux seulement rentrer chez moi..je..j’ai failli me faire écraser par ce train, le cadeau que m’a offert mon père est parti en fumée et et.. Et je viens d’avoir vingt ans, mais je sais.. Vous allez me dire que ça ne m’a pas mis beaucoup de plomb dans la cervelle hein?.. Génial pour un anniversaire…j‘ai tout gâché….normal hein pour une gamine écervelée..

Et elle s’effondra, les mains devant son visage tentant vainement de cacher ses larmes, son corps secoué par les sanglots, elle se courba sur elle-même, sentant ses jambes qui ne la tenaient plus.

Suite: propriété Tanner...